Décalogue et Église catholique
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L'Église catholique et la sexualité
La définition de l'homosexualité
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Dieu créa l'homme à son image (…),

homme et femme Il les créa (CEC 2331)



Mettre les citations de la Genèse dès le deuxième paragraphe de l'article consacré au sixième commandement sert à orienter la réflexion d'ensemble. D'autant plus que le premier paragraphe donne le sens qu'il faut attribuer aux citations : " en créant l'humanité de l'homme et de la femme à son image (…) Dieu inscrit en elle la vocation, et donc la capacité et la responsabilité correspondantes, à l'amour et à la communion " (CEC 2331).

Ce qui tend à faire croire que l'image de Dieu est un couple formé d'un homme et d'une femme unis par l'amour. Et on en conclura que la sexualité ne peut être vécue que dans le couple uni, et hétérosexuel.
Pourtant, dans la partie qui explique ce que représente pour l'homme d'avoir été créé à l'image de Dieu (CEC 356-361) et d'avoir été créé homme et femme (CEC 369-373), le Catéchisme précise que d'avoir été faits " l'un pour l'autre " ne veut pas dire que l'homme et la femme n'auraient été faits " qu'à moitié " et " incomplets " (CEC 372). Il se contente de dire que cela implique que l'homme est ainsi appelé à partager la vie de Dieu par la connaissance et l'amour ; que cela lui donne la dignité de personne ; qu'il a l'obligation de servir Dieu ; que tous les humains sont frères. Puis le texte explique que " créés ensemble, l'homme et la femme sont voulus par Dieu l'un pour l'autre " (CEC 371), et que " dans le mariage, Dieu les unit de manière que, en formant "une seule chair", ils puissent transmettre la vie humaine " (CEC 372).

Les formulations restent générales et tiennent compte de la très grande difficulté de donner un contenu précis à l'expression biblique. Intuitivement on " comprend " son sens. Mais si l'on veut le formuler de façon précise, de multiples problèmes surgissent.

Le sens du texte n'est en effet vraiment pas clair : signifierait-il que Dieu est à la fois mâle et femelle ? L'idéal humain serait-il alors de refaire le couple pour imiter Dieu ? Je ne peux être un humain accompli que si je rejoue le couple ? Que si j'essaie de mimer l'être divin double ?

Mais comment concilier cela avec d'autres affirmations du Catéchisme : " Dieu n'est aucunement à l'image de l'homme. Il n'est ni homme ni femme. Dieu est pur esprit en lequel il n'y a pas place pour la différence des sexes. Mais les "perfections" de l'homme et de la femme reflètent quelque chose de l'infinie perfection de Dieu : celles d'une mère et celles d'un père et époux " (CEC 370) ? Si la différence des sexes n'est pas en Dieu, ce n'est pas par la différence des sexes que nous sommes images de Dieu, ni par la réunion de deux sexes différents.

Et si la liste des perfections de Dieu donnée par la citation est complète, elle ne laisse pas de place pour la perfection de la femme comme épouse, par exemple. Si elle est incomplète, elle laisse ouverte la liste des perfections humaines, épouse, amante, ami, amie, frère, sœur : rien ne limite cette liste aux données du couple hétérosexuel.

En plus, si " l'homme et la femme sont voulus par Dieu l'un pour l'autre ", le célibataire ne serait alors pas un humain. Est-ce que la perfection pour les humains serait uniquement d'imiter, de simuler, la dualité divine en se mariant, et en ayant des enfants ? Parce que Dieu a eu des enfants (ou un fils) en unissant sa partie mâle et sa partie femelle ? Comment comprendre que Grégoire de Nysse, évêque marié du IVe siècle, affirme que seule la nature humaine est semblable à Dieu, pas la différenciation des sexes : celle-ci était réservée aux animaux, et n'aurait été donnée à l'homme qu'après coup, en un deuxième temps (De homine, 16, 22). Ce que confirme saint Augustin : la ressemblance de l'homme à Dieu est limitée au domaine où la différence sexuelle n'apparaît pas (De Trinitate, XII, VII, 12).

De quelque façon que l'on retourne l'expression de la Bible, les difficultés d'interprétation restent insurmontables et les prises de position des autorités, divergentes ou contradictoires. Il serait bon d'imiter la prudence d'un prêtre contemporain comme Patrice Vivarès : " il est cependant difficile de spécifier la distinction homme-femme dans son rapport à Dieu en qui réside l'altérité. Parler de Dieu mère n'est pas non plus convaincant. L'altérité inhérente à Dieu doit être d'abord pensée en termes du rapport du Père et du Fils dans l'unité du Saint-Esprit. Il est donc difficile de décrypter ce verset "homme et femme il les créa, à son image". Que mettre sous le mot d'image ? " (Les chrétiens et la vie affective, 20).

Parler de l'altérité sexuelle pour Dieu est difficile, et même refusé par le Catéchisme, et la Trinité serait une approche plus adéquate de l'altérité : mais alors comment, en bonne logique, faire dire au texte que l'homme n'est là que pour la femme et réciproquement quand on doit partir de l'image de la Trinité ?

Finalement, la confusion est vraiment très grande.

Essayons de clarifier la problématique devant laquelle se trouve un croyant.

Ou le seul destin humain est le couple parce que " créés ensemble, l'homme et la femme sont voulus par Dieu l'un pour l'autre " (CEC 371), et ne sont voulus que pour cela : alors le célibat est une aberration, une faute grave qui va à l'encontre du projet divin.

Ou, si c'est seulement " dans le mariage que Dieu unit (l'homme et la femme) de manière que, en formant "une seule chair" ils puissent transmettre la vie humaine " (CEC 372), ce qui semble relever du bon sens, il y a une multiplicité de voies possibles afin de " partager la vie de Dieu… ", dont l'une est le mariage et la transmission de la vie, et dont les autres ne sont pas fixées par le texte, qui n'évoque même pas le célibat consacré comme possibilité.

On ne peut donc pas dire que certains peuvent choisir le célibat pour atteindre la perfection, et que tous les autres n'ont que le couple hétérosexuel marié visant la procréation comme voie de salut. Ce qui serait dénier à ceux qui ne veulent pas du célibat consacré la liberté que ces célibataires se donnent à eux-mêmes de choisir leur façon de vivre. Comme si le célibataire consacré disait : " il n'y a que la forme de célibat consacré, que j'ai choisie, qui peut faire exception à l'obligation de vie en couple hétérosexuel ".

Et exception aussi au " Croissez et multipliez-vous ".


Si " l'union de l'homme et de la femme est une manière d'imiter dans la chair la générosité et la fécondité du Créateur " (CEC 2335. C'est nous qui soulignons), alors le texte du Catéchisme confirme qu'il existe d'autres manières d'imiter dans la chair le Créateur.


  

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