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« Tu ne commettras pas d’adultère »


Ce commandement est particulièrement mis à toutes les sauces pour justifier nombre d'interdits sexuels contemporains. Il est donc raisonnable d'examiner sur quoi porte exactement l'interdit qu'il formule.


Le commandement sur l'adultère fait partie d’un ensemble de dix dont les quatre premiers se rapportent essentiellement à Dieu, défini comme unique, et qu’il faut traiter autrement que les peuples environnant Israël traitent leurs idoles. Puis viennent les six commandements « sociaux » : honorer ses parents, ne pas tuer, ne pas commettre l’adultère, ne pas réduire en esclavage, ne pas témoigner faussement, ne pas convoiter le bien d’autrui. Ce sont à l’évidence des règles de vie gérant les relations entre les membres d’un même groupe social.


Que signifie dans ces conditions « tu ne commettras pas l’adultère » ? La société patriarcale, où la polygamie est acceptée (encore à l’époque de Jésus), où le chef de famille peut avoir en plus de ses épouses des concubines, où des relations sexuelles avec les servantes sont habituelles (et les enfants issus de ces liaisons sont légitimes, cf. Abraham), où les relations avec les prostituées ne sont pas disqualifiantes (Booz, Juda…) et où la répudiation de la femme était prévue par la loi, peut-on affirmer qu’il y a là l’obligation de former un couple unique, d’être fidèle à l’amour ou à l’autre, de respecter un engagement que l’on aurait pris envers son conjoint ? Tout indique qu'il n’en est pas question.

Le contexte oriente plutôt vers l’interdiction d’une action qui peut nuire à autrui, aux autres : « tu ne commettras pas l’adultère » signifie non pas « tu ne tromperas pas ton conjoint », mais « tu ne t’uniras pas au conjoint d’autrui », tu n’useras pas de la femme qui appartient à un autre homme du clan, tu ne causeras pas de tort aux autres hommes de ton clan, du groupe, en utilisant un de leurs biens. D’ailleurs, au chapitre 18, le Lévitique précise : « tu n’auras pas de relations sexuelles avec la femme de ton compatriote, ce qui te rendrait impur ».


Donc, ne peut être adultère qu’un homme qui se lie à la femme d’un autre, et non un homme marié qui a des rapports avec une femme célibataire.

Ce n’est pas envers sa femme que l’on est adultère, c’est envers un autre homme du clan.

En somme, on ne touche pas à ce qui appartient à un autre homme du clan, mais on peut avoir les relations que l’on veut avec toutes les femmes que l’on possède personnellement (épouses multiples, concubines, servantes) ou qui sont indépendantes (célibataires, veuves, répudiées), ou même avec les femmes mariées, mais à un étranger !


De même, une femme commet un adultère si elle a des relations avec un autre homme que celui auquel elle appartient. Mais si elle est libre, si elle n'appartient à aucun homme, elle ne peut pas commettre d'adultère, même si elle a des relations sexuelles avec un homme marié.

D'ailleurs, il y a des degrés d'appartenance : ainsi, « si un homme a des relations sexuelles avec une femme et qu’il s’agisse d’une servante réservée à quelqu’un, mais ni rachetée ni affranchie, cela donne lieu à une indemnisation » (Lévitique 19, 20). Une esclave réservée n’appartient plus vraiment à son ancien propriétaire, mais elle n’appartient pas non plus vraiment au nouveau tant qu’il ne l’a pas rachetée : personne n’ayant un droit total de propriété, la règle générale doit être aménagée !

Et si c'est le propriétaire qui prête son bien, la Bible n'évoque pas l'adultère : ainsi Abraham, ayant peur d'être tué par les Égyptiens qui voudraient s'approprier sa femme, Saraï, particulièrement belle, demande à son épouse de se faire passer pour sa sœur. Tout se déroule selon les prévisions du patriarche, et Pharaon prend dans son harem Saraï, comble de bienfaits son frère Abraham. Celui-ci a donc bien disposé à sa guise de son épouse, comme d'une marchandise à échanger avec Pharaon, et il a repris son épouse comme si de rien n'était quand Pharaon la lui a rendue (Gen., 12, 11-20). Cf. aussi les cas similaires de Gen. 20 et 26, 6-14.

 

En somme, les lois mosaïques se contentent de viser la paix sociale du groupe des Hébreux en prescrivant de ne pas léser un autre membre du clan, donc de ne pas le tuer, ni s’unir à sa femme, ni l’enlever pour le mettre en esclavage, ni lui nuire par faux serment, ni désirer un de ses biens. Il y a là des règles de bon voisinage, qui permettent la vie sociale et la régissent. Il n’y a rien qui s’apparente à ce que nous entendons, nous, par adultère, qui est pour nous « violation du devoir de fidélité entre les époux » et les dix commandements ne s’occupent pas de ce qui se passe dans l’intimité entre un homme et une femme. D’ailleurs, si certains textes tardifs des prophètes parlent de l’adultère d’une façon qui montre qu’ils le considèrent comme un rejet de l’amour, beaucoup d’autres restent dans l’esprit du Décalogue, qu’ils explicitent seulement. Pour eux le commandement est juste un précepte de prudence : en volant un bien précieux à autrui, on suscite sa rage et sa vengeance ; on en subira les conséquences néfastes, on risque sa vie, et c’est cela que le sage doit éviter. Le livre des Proverbes est très clair : « le commandement est une lampe… pour te préserver de la femme en pouvoir de mari… L’homme adultère… récolte coups et quolibets, jamais ne s’effacera sa honte. Car la jalousie allume la rage au cœur du mâle ; au jour de la vengeance il ne fera pas de quartier, il n’aura égard à aucune compensation, il ne consentira à rien, quand tu lui prodiguerais les présents » (Proverbes 6, 23-24, 34-35).


Le respect des commandements permet simplement la sauvegarde de l’ordre social.


La conclusion s’impose : les commandements portent sur le respect dû à Dieu, à ses parents et aux autres membres de la tribu ; ils ne parlent pas d’amour entre époux, mais de femmes qui sont la propriété de leurs maris, propriété à respecter comme celle de tous leurs autres biens.


Yves Ferroul

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